Détester par procuration

La pression sociale a un pouvoir étrange : elle peut nous pousser à aller contre nos propres convictions juste pour préserver une place dans un groupe ou ne pas décevoir quelqu’un qu’on estime. Ça commence toujours doucement : un silence pour éviter le conflit, un “oui” par confort, un alignement qui n’est pas vraiment le nôtre.

Mais le pire, selon moi, c’est quand cette pression nous amène à détester par procuration. Haïr quelqu’un non pas parce qu’il nous a fait du tort, mais parce qu’une personne qu’on apprécie le déteste. Adopter les ennemis des autres comme si c’était un package obligatoire de la loyauté. C’est absurde quand on y pense. Comment en venir à nourrir de l’animosité envers quelqu’un qu’on ne connaît pas, simplement pour rester fidèle à un récit qui n’est même pas le nôtre ?

Comment laisser les émotions d’un autre prendre le contrôle de notre propre jugement ? La loyauté, la vraie, n’est pas une fusion. On peut aimer quelqu’un sans porter ses guerres. On peut écouter sans adopter. On peut comprendre sans s’effacer. Dire “je te respecte, mais je pense par moi-même” n’est pas une trahison. C’est de la maturité.

Parce qu’au fond, la seule personne qu’on ne doit jamais trahir… c’est soi-même.

Georges DEFO