Le droit de changer d’avis

Tu serais surpris de voir jusqu’où certaines personnes sont prêtes à aller, uniquement pour sauver les apparences.
J’ai toujours considéré que quelqu’un qui se trompe par ignorance peut être pardonné, alors que celui qui agit mal en toute conscience a bien moins d’excuses.
Et pourtant, de plus en plus de gens préfèrent maintenir une image parfaite, plutôt que de reconnaître une erreur ou d'admettre qu’ils ont changé d’avis.
On vit dans une époque où l’opinion des autres pèse plus lourd que ce qui est juste ou cohérent.

C’est aussi pour cette raison que je me méfie des jugements hâtifs envers ceux qui changent de discours ou d’opinion.
Tu me parleras de fiabilité — et dieu seul sait à quel point c’est une vertu importante pour moi.
Mais il faut aussi se souvenir que nous restons humains, donc faillibles, et que notre jugement peut évoluer.
Ce qui compte vraiment, à mes yeux, ce n’est pas de rester figé, mais d’assumer pleinement ses paroles passées :
Reconnaître qu’on s’est trompé.
Ou au minimum, ne pas renier ses propos sous prétexte qu’ils ne nous arrangent plus.

Je dis ça parce que je suis bien placé pour en parler.
J’ai moi-même cru dur comme fer à certaines choses, sans jamais envisager qu’un jour, ces convictions pourraient perdre de leur sens.
Et parfois, il aura suffi d’un autre contexte, d’une nouvelle expérience, ou d’une conversation pour que tout bascule.

Ce samedi, autour d’un bon petit repas avec mon ami de très longue date Franck, on parlait de nos multiples projets, tous plus ou moins liés à notre retour au Cameroun.
Il m’a soumis un sujet pour avoir mon avis — il paraît que je suis plutôt bon conseiller, surtout quand il s’agit des problèmes des autres (tu me diras, on est tous un peu comme ça, non ?).

Il s’agissait d’un sujet que je connaissais, mais sur lequel je m’étais volontairement abstenu de commenter jusque-là.
Et c’est là que le changement m’a sauté aux yeux.

Il fut un temps où, dès que je voyais quelque chose de bancal ou de potentiellement dangereux pour un proche, je donnais mon avis sans filtre.
Même quand on ne me le demandait pas.
Je pensais que c’était ça, être un vrai ami. Mais aujourd’hui, je ne suis plus aussi sûr.
Ce qui me paraissait évident à l’époque… ne l’est plus forcément maintenant.Mais aujourd’hui, je ne suis plus aussi sûr.
Ce qui me paraissait évident à l’époque… ne l’est plus forcément maintenant.

Et tu sais ce qui m’a aidé à faire ce pas de recul ?
La lecture d’un chapitre du livre Comment se faire des amis de Dale Carnegie.
Il y expliquait une chose toute simple : la meilleure façon d’avoir de l’influence sur quelqu’un, ce n’est pas de lui faire la leçon — c’est de lui donner l’envie de réfléchir par lui-même.

Il ajoutait même que critiquer quelqu’un, même avec de bonnes intentions, est souvent contre-productif.
La personne se braque. Elle se sent jugée.
Et au lieu d’écouter, elle se ferme.

Et là, j’ai repensé à toutes ces fois où j’ai voulu "aider" un ami en lui disant crûment ce que je pensais.
Avec le recul, je me rends compte que ce n’était pas toujours la meilleure façon.
Parfois, il vaut mieux laisser l’autre vivre son expérience, poser des questions, accompagner… plutôt que d’imposer sa vérité.

Changer d’avis ne fait pas de toi une girouette.
Ça fait de toi quelqu’un qui apprend.

Et reconnaître qu’on n’a pas toujours su s’y prendre, c’est aussi une forme d’amitié.
Une amitié qui laisse de l’espace à l’autre.
Et qui grandit avec le temps.

Georges DEFO