« Même la plus belle femme du monde ne peut offrir que ce qu’elle possède »
C’est un proverbe africain que j’ai toujours trouvé puissant. Parce qu’il dit une vérité simple mais qu’on a souvent du mal à accepter : tu ne peux pas attendre d’une personne ce qu’elle n’a pas. Même la plus belle femme du monde, malgré ses atouts, ne peut donner que ce qu’elle possède.
Appliquons cela à notre réalité au Cameroun et dans d’autres pays africains. Comment veux-tu qu’un jeune qui grandit dans un environnement où il n’y a presque pas d’emplois, où les perspectives sont bouchées, où l’État a depuis longtemps abandonné une partie de sa jeunesse, puisse offrir plus que ce que son contexte lui permet ? Beaucoup finissent par tendre la main, non pas parce que c’est dans leur nature d’être des mendiants, mais parce qu’ils n’ont pas d’autre choix. Quand tu n’as pas de filet social, pas d’opportunités, pas de soutien, tu apprends à survivre au jour le jour. Mon discours n'est pas ici pour encourager certains comportements, mais aussi pour demander à ceux-là qui prennent facilement de haut nos frères et soeurs restés au pays et parfois même jusqu'à les traiter de paresseux, de ne pas oublier ces paramètres.
Et ça, c’est donc le drame : des jeunes brillants, bourrés d’idées et d’énergie, finissent parfois piégés dans un système qui les pousse à vivre de petits boulots, d’aides extérieures, parfois de l’assistanat. Certains réussissent dans ce contexte, mais la majorité est victime de ce contexte. Comme le dit le proverbe : tu ne peux donner que ce que tu possèdes, et si tu n’as rien, que veux-tu partager ?
En Europe, la logique est différente mais tout aussi révélatrice. Depuis des décennies, certains dirigeants malhonnêtes, pour détourner l’attention des vrais problèmes économiques et sociaux, n’ont cessé de répéter que « le problème, ce sont les étrangers ». Et à force d’entendre ce discours, une partie de la population a fini par y croire. Non pas parce qu’ils sont naturellement haineux ou racistes, mais parce que c’est tout ce qu’on leur a offert comme explication. On leur a martelé que la pauvreté, le chômage, l’insécurité venaient de l’immigration. Résultat ? Beaucoup ont développé une méfiance, voire une hostilité, envers ceux qui ne sont pas responsables de leur mal-être.
Que ce soit au Cameroun ou en Europe, ce proverbe prend tout son sens. Les populations ne font souvent que refléter ce qu’on leur a donné : pauvreté, frustration et désespoir d’un côté ; peur, désinformation et ressentiment de l’autre.
Alors oui, chacun de nous est limité par ce qu’il a reçu, par ce qu’il a vécu, par ce qu’il possède en lui. Mais à nous de comprendre qu’avant de juger, il faut aussi se demander : qu’est-ce qu’on a réellement offert à cette personne, à ce peuple, à cette jeunesse ?
Et peut-être que le vrai travail commence ici : donner de meilleures ressources, de meilleures opportunités, un autre discours… pour que demain, ils puissent offrir autre chose que la survie et la rancune.
Georges DEFO