POURQUOI ?

Le mot préféré de mon fils. Et celui que je déteste.

Encore plus depuis qu’il l’utilise après chaque réponse que je lui apporte à sa précédente question.

On pourrait croire que c’est lui qui m’a fait détester ce mot. Mais non.

En marketing, on fait tout pour éviter ce qu’on appelle des “irritants” — ces éléments qui donnent à la cible l’envie de fuir ou de résister au message qu’on veut faire passer. Et à force d’étudier ça, j’ai compris une chose :

les gens n’aiment pas qu’on leur pose de questions.

Et encore moins se poser des questions à eux-mêmes.

Ils préfèrent souvent, sans même s’en rendre compte, laisser les autres penser ou décider pour eux.

Pourquoi crois-tu que tant de gens suivent des débats télé ou des lignes éditoriales qui vont exactement dans leur sens ?

Parce qu’ils cherchent à se conforter, pas à réfléchir.

Ils choisissent inconsciemment qui va leur dire quoi penser et comment penser.

Il ne s’agit pas ici de mettre tout le monde dans le même sac, mais soyons honnêtes : la majorité fonctionne ainsi.

Combien prennent vraiment le temps de croiser les informations, de confronter plusieurs points de vue ?

Peu le font. Par flemme, ou pour éviter l’inconfort que provoque la fameuse dissonance cognitive.

Mais je m’éloigne.

Ce dont je voulais vraiment te parler, c’est de notre refus collectif de nous poser la question “Pourquoi ?”

Parce que si on le faisait plus souvent, je pense qu’on serait plus alignés, plus lucides, et qu’on aurait moins l’impression de subir la vie.

Est-ce qu’avant de faire quoi que ce soit, tu te demandes vraiment pourquoi tu le fais ?

Et ne me réponds pas :

  • “Parce que untel m’a dit que…”
  • “Parce que j’ai vu que tel autre, qui en est au même stade que moi, a décidé de…”

Non. Dans ces cas-là, tu as juste laissé quelqu’un d’autre réfléchir à ta place.

Et il y a même de fortes chances que cette personne-là ait elle-même copié une autre.

Au final, on se retrouve dans un bal de mimes, où tout le monde joue un rôle sans jamais se demander si c’est le sien.

De la même manière qu’on te dit de réfléchir avant de parler, tu devrais te demander pourquoi tu t’apprêtes à faire ce que tu vas faire.

Et si cette question t’agace ou t’irrite, c’est justement parce qu’elle touche à quelque chose d’important.

Ce n’est pas le moment de fuir.

C’est le moment de creuser.

Tu seras tenté de demander de l’aide, de déléguer la réflexion, de faire une procuration de ton propre jugement.

Résiste à cette tentation.

Pose-toi. Réfléchis. Écris s’il le faut.

Et si tu n’as pas de réponse claire à ton “pourquoi”, alors peut-être que tu n’as pas encore besoin d’agir.

Parce qu’un acte sans intention, c’est comme une flèche tirée sans cible : tu gaspilles ton énergie, ton temps… parfois ta vie.

On passe notre temps à courir, à enchaîner les choix, à suivre des modèles qu’on ne comprend même pas.

Mais le vrai pouvoir, c’est celui de reprendre la maîtrise de ta trajectoire, et ça commence par une seule question :

Pourquoi ?

Pourquoi tu veux ce job ?

Pourquoi tu poursuis cette relation ?

Pourquoi tu veux partir ? Pourquoi tu veux rester ?

Pourquoi tu fais ce que tu fais tous les jours ?

Pourquoi tu devrais détester quelqu'un juste parce que les autres ne le trouvent pas cool?

Et si ces réponses ne viennent pas de toi, tu ne vis pas ta vie — tu joues dans le scénario de quelqu’un d’autre.

Alors oui, mon fils m’énerve avec son “pourquoi” répété dix fois de suite.

Mais en vrai, il me rappelle une chose que j’avais oubliée :

👉 Ceux qui posent les bonnes questions finissent toujours par aller plus loin que ceux qui se contentent de suivre.

Georges DEFO