Soyons des Tonton Charles Ces figures familiales qui ne demandent rien, mais donnent tout.
Je parlais avant-hier au téléphone avec Tonton Charles, comme j’aime l’appeler respectueusement. Tonton Charles est en réalité mon cousin, mais je pense qu’il y a bien une vingtaine d’années d’écart entre nous. Et depuis tout petit, je l’ai toujours vu comme un papa — pourtant, somehow, nous sommes tous les deux jeunes. Tonton Charles et moi avons le même grand-père paternel, il est donc ce qu’on appelle un oncle paternel.
C’est souvent le sujet de raillerie dans nos familles africaines. À raison ou à tort, les membres de la famille paternelle sont souvent perçus comme opportunistes ou intéressés. Ce sont ceux-là qui, quand survient un décès, s’accaparent les biens du défunt papa. Je n’ai pas de statistiques, mais si un sondage était lancé, je pense que beaucoup valideraient ce ressenti.
Mais pourquoi je te parle de Tonton Charles ? Parce qu’il a toujours été là. Dans mon esprit d’enfant, c’était l’oncle le plus riche. Celui qui, lorsqu’il passait à la maison, envoyait acheter à boire pour tout le monde. Et quand il partait, je savais que le lendemain, à l’école, j’allais me sentir comme un président — si maman ne me jonglait pas l’argent qu’il me laissait. J’étais trop petit pour comprendre ce que ces gestes représentaient, mais aujourd’hui encore, Tonton Charles fait partie de ces rares membres de la famille paternelle dont je respecte et écoute les conseils.
Quand il m’appelle, ce n’est jamais pour demander. C’est parce qu’il a appris que je traverse un moment difficile, ou qu’il a une info qui pourrait m’être utile. Et souvent, simplement pour savoir comment je vais. Ça n’a l’air de rien… mais ça n’a pas de prix.
Je pense que si beaucoup d’enfants finissent par adopter une vision négative de la famille du père, c’est parce qu’il y a trop peu de Tonton Charles. Et pourtant, il est essentiel qu’on se rappelle que les enfants grandissent. Et le respect ou l’affection qu’on attend d’eux ne sera que le fruit de ce qu’on leur aura semé.
Spoiler alert : c’est grâce à Tonton Charles que j’ai pu quitter la Roumanie pour la France. Mon garant était l’un de ses jeunes collègues, qu’il avait encouragé à poursuivre ses études à l’étranger. Des années plus tard, par pure reconnaissance, ce dernier m’a tendu la main.
Soyons des Tonton Charles pour nos neveux et nièces. Pas pour qu’ils nous rendent la pareille, mais parce que ça fait de nous de meilleures personnes. Et que le monde a besoin de plus de liens sincères, pas de plus de demandes.
Georges DEFO