Tant que ce n’est pas toi, ça va ?

Il y a quelque chose de profondément ironique dans la façon dont nous célébrons parfois la restriction des libertés… tant qu’elle ne nous touche pas directement.

Quand un collègue se fait renvoyer pour avoir exprimé une opinion, on détourne le regard. Quand un voisin est brutalisé pour avoir manifesté, on se dit qu’il aurait mieux fait de rester chez lui. Quand une loi retire un droit à une minorité, on en plaisante, parce que ce n’est pas « notre » combat.

Mais l’Histoire a une mémoire cruelle. Elle nous montre que l’agresseur ne s’arrête jamais à sa première cible. Il teste. Il observe. Il mesure le silence. Et plus il se rend compte que personne ne bronche, plus il avance.

Ceux qui rient aujourd’hui peuvent très bien pleurer demain. Parce que la liberté, c’est un bloc. Quand on commence à en grignoter un morceau, ce n’est qu’une question de temps avant que tout s’effondre. Et quand on applaudit pendant que le voisin se fait ligoter, on donne juste à l’agresseur la certitude qu’il pourra venir nous chercher ensuite, sans trop de résistance.

Les bourreaux se nourrissent de notre indifférence. Chaque silence est un encouragement. Chaque haussement d’épaule est une autorisation tacite.

Alors non, ce n’est pas intelligent de se réjouir de la chute de l’autre, même si ses idées ou ses choix de vie ne nous conviennent pas. Parce que le jour où ce sera notre tour, il n’y aura plus personne pour s’indigner. On aura tous appris à se taire. A bon entendeur, salut.

Georges DEFO